Par François Launaz, Président d’auto-suisse

Début juillet publie l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) les données sur la consommation moyenne des voitures de tourisme neuves de l’année précédente. C’est sur ces valeurs que repose aussi la valeur moyenne de CO2 par flotte qui est communiquée en même temps. Selon l’OFEN, les voitures neuves immatriculées pour la première fois en Suisse ou au Liechtenstein en 2019 ont consommé 6,18 litres d’équivalents essence aux 100 kilomètres. La valeur énergétique des véhicules non alimentés en essence est convertie en équivalents essence pour permettre la comparabilité. Les émissions de CO2 sont calculées par kilomètre et ont été de 138,1 grammes, sans changement notable par rapport à l’année précédente (+0,3 g). La consommation moyenne des voitures a baissé de 31 pour cent depuis 1996, où elle se montait encore à exactement 9 litres d’équivalents essence aux 100 kilomètres. Les émissions moyennes de CO2 ont même été réduites de 36 pour cent, ce qui s’explique par la part de marché accrue du diesel et l’avènement des propulsions alternatives.

L’objectif d’auto-suisse et de ses membres consistant à réduire les émissions de CO2 des voitures de tourisme neuves a surtout été manqué en 2019 en raison d’un phénomène technique: l’introduction à l’échelle européenne du nouveau cycle d’essai WLTP («Worldwide Harmonized Light Vehicle Test Procedure»), qui s’applique aux voitures neuves importées en Suisse depuis le 1er septembre 2018. Les conditions de test plus strictes du cycle WLTP se traduisent par une hausse des valeurs de consommation et de CO2 par rapport au test précédant, le «Nouveau Cycle Européen de Conduite» NCEC, et ce non seulement en comparaison directe, mais aussi après une reconversion compliquée en «NCEC 2.0». Ce rétrocalcul est nécessaire parce-que dans toute l’Europe, les valeurs cibles de CO2 sont définies en valeurs WLTP dès 2021 seulement. L’objectif NCEC était de 130 g/km en moyenne jusqu’à 2019 et est abaissé à 95 g/km cette année.

Même l’OFEN admet que les émissions de CO2 d’un modèle comparable sont de 5 à 6 % plus élevées lorsque les mesures sont faites conformément au WLTP puis reconverties en NCEC 2.0 que si elles sont effectuées directement par NCEC (vidéo explicative). En 2018, cette adaptation ne concernait qu’environ 25 % des voitures de tourisme neuves en Suisse et au Liechtenstein, en 2019 le cycle WLTP s’appliquait à plus de 90 %. Le changement du cycle d’essai occulte donc la réduction effective des émissions de CO2 des voitures neuves réalisée par nos membres. Son effet est aussi bien plus important que l’effet contraire dû à l’accroissement sensible des parts de marché des propulsions alternatives. En 2019, 13,1 pour cent des véhicules neufs disposaient d’une propulsion hybride, électrique, à gaz ou à pile à combustible, tandis que c’était encore le cas pour 7,2 pour cent seulement en 2018.

Malheureusement, bien que l’objectif n’ait été manqué que de peu, c’est-à-dire d’environ 6 pour cent, les importateurs sont lourdement pénalisés et payent des sanctions nettement plus élevées que l’année d’avant. Pour 2019, les sanctions imposées aux importateurs d’automobiles se montent à 78,1 millions de francs, ce qui constitue une hausse importante par rapport aux 31,7 millions pour l’année de référence 2018. Cette hausse est due à l’augmentation du montant à payer par gramme dépassant la valeur cible. Jusqu’à présent, il fallait payer entre 5.50 et 27.50 francs par véhicule pour les premiers trois grammes. Le montant a été augmenté à 111 francs à partir du premier gramme pour l’année de référence 2019. Ainsi, la sanction à payer en cas de dépassement minimal de la valeur cible d’un gramme par kilomètre, par exemple, a été multipliée par plus de vingt d’une année à l’autre. Les importateurs suisses payent donc cher le changement du cycle d’essai européen. Dans de nombreux cas, ils se verront obligés de répercuter cette hausse sur les prix des véhicules neufs. L’adoption de la stratégie énergétique 2050 ne laisse aucun doute quant à la légalité de ce renchérissement. L’éventuelle votation sur la nouvelle loi sur le CO2 l’année prochaine définira la direction ultérieure.